de(s)générations 08
Pour un communisme
Rédacteur : Philippe Roux
Sommaire
- Alain Brossat : Il y a du communisme…
- Gérard Conio : De l’utopie au pouvoir au démocratisme totalitaire
- Jean-Luc Nancy : Ce que “communisme” a porté (entretien avec Jean-Marc Cerino)
- Nathalie Quintane : Posssible
- Rémy Bac : Du communisme
- Alain Badiou : Pour un communisme (entretien avec Philippe Roux)
- Alexandre Costanzo et Daniel Costanzo : Quelques territoires émancipés
- Belkacem Boudjellouli : Comment raconter le temps (entretien avec Jean-Marc Cerino)
- Fabien Tarby : Politiques du multiple, politiques de l’événement : Deleuze et Badiou
- Jacques-Henri Michot : Sept journées d’une chronique
- Capitalistes vous êtes morts et on vous mord comme unisme !
- Gilles Favier, photographies
- David Ter-Oganyan, photographies
Caractéristiques techniques
Date de publication : 10 mars 2009
Format : 14,8 x 21 cm - 96 pages
ISBN : 978-2-35575-058-8
ISSN : 1778-0845
Edito
Il fait froid.
Il fait froid sur les idées d’émancipation politique.
La puissance des démocraties médiatico-parlementaires, ce que Pasolini appelait néo-fascisme, est une machine à répression qui ne va pas de soi. Elle sait renverser les codes d’émancipation en codes de répression. Ses banques, comble de cynisme, ont même revêtu les habits vertueux d’un nouvel humanisme.
Les frontières qui définissent ce néo-capitalisme sont de plus en plus difficiles à circonscrire, alors que s’accentuent concomitamment la casse sociale et le contrôle, l’exclusion et l’accroissement des richesses.
Deleuze a démontré dans L’Anti-Œdipe(1) la capacité du capitalisme contemporain à intégrer sa limite externe dans sa limite interne. Il n’y a plus d’extériorité, écrivait-il, tout est intégrable dans la logique du capital, même la contestation, d’où l’action mortifère de cette toute-puissance.
Il fait froid dans les eaux glacées des calculs égoïstes et le capitalisme charrie des cadavres. Le capital a prononcé la fin d’une civilisation qui s’est pensée sur l’idée de lien, laissant cette question à laquelle il faudra répondre : le « nous » a-t-il encore un sens ? Le capitalisme mettant en concurrence des individus pour le bonheur, devient suspect tout ce qui agit pour conquérir du lien. Aucune philosophie plus que celle de Badiou n’a tenté de réactiver ce lien, tout d’abord en parlant de « l’invariance communiste » (2). Le communisme ne se réduit pas à sa naissance historique, à savoir marxiste, mais s’étend en aval comme en amont : Spartacus, la Révolution de 1789, la Commune de Paris, le Front populaire, la Résistance française, Mai 68, et certainement à un degré bien moindre mais important, les manifestations de 95, les émeutes de 2005, voire ce qui se joue aujourd’hui à Athènes. Il y a un évènement éternel. Le seul événement auquel on doit être fidèle, qui rend nécessaire la continuation des combats, et nous permet de dire, par exemple, que quelque chose a commencé en 1789 qui n’est pas encore fini, qu’il faut que l’on finisse. Tant que cette « hypothèse communiste » existera, survivra notre question vitale : « Que peut être un “nous” qui n’est pas soumis à l’idéal d’un “je” ? »(3).
La puissance de la restauration de l’ultra-droite et de ses alliés socio-démocrates de gauche a été d’imposer une violence fataliste qui cache une propagande : « il n’y a pas mieux que la démocratie et le capitalisme ». Ils nous font porter le poids de cette fatalité. Reste à nous de la combattre, il en va de notre dignité, « jusqu’à ce qu’ils me trouvent, jusqu’à ce qu’ils me disent, étrange peine, étrange faute, il faut continuer, c’est peut-être déjà fait, ils m’ont peut-être déjà dit, ils m’ont peut-être déjà porté jusqu’au seuil de mon histoire, devant la porte qui s’ouvre sur mon histoire, ça m’étonnerait, si elle s’ouvre, ça va être moi, ça va être le silence, là où je suis, je ne sais pas, je ne le saurai jamais, dans le silence on ne sait pas, il faut continuer, je ne peux pas continuer, je vais continuer. »(4)
Ce numéro est dédié à ceux qui continuent.
Philippe Roux
(1) Deleuze, L’Anti-Œdipe, Éditions de Minuit, 1995
(2) Badiou, La logique du monde
(3) Badiou, Le siècle, Le Seuil, 2005
(4) Beckett, L’Innommable, Les Éditions de Minuit, 1949
Pages liées à « de(s)générations 08 » :
Ont participé à De(s)générations n°8
Rémy Bac, Alain Badiou, Stéphane Bérard, Belkacem Boudjellouli, Alain Brossat, Gérard Conio, Alexandre Costanzo, Daniel Costanzo, Gilles Favier, Jacques-Henri Michot, Jean-Luc Nancy, Nathalie Quintane, Fabien Tarby, David Ter-Oganyan
Rémy Bac, Alain Badiou, Stéphane Bérard, Belkacem Boudjellouli, Alain Brossat, Gérard Conio, Alexandre Costanzo, Daniel Costanzo, Gilles Favier, Jacques-Henri Michot, Jean-Luc Nancy, Nathalie Quintane, Fabien Tarby, David Ter-Oganyan